Les neurones supérieurs

24-11-2010

Demandez au médecin :  les neurones supérieurs.

Edward Kasarkis est directeur du Centre- SLA  multidisciplinaire faisant partie du Centre des Neurosciences  à l’Université du Kentucky à Lexington; il est professeur au Département de Neurologie de l’ Université du Kentucky et Chef du Département  Neurologie du Centre Médical pour Vétérans à Lexington KY.

Question :  Il y a un an on a diagnostiqué la SLA chez mon frère de 38 ans.  Lors de son unique visite à la clinique pour  SLA  le médecin lui a dit que son cas concernait principalement « les motoneurones   supérieurs ».   Que cela signifie-t-il ?  Il peut à peine marcher et il  lui est impossible d’utiliser ses mains (c’était par là que les symptômes ont commencé).  Il a perdu pour ainsi dire l’usage de la parole.  Quelle différence y a-t-il entre  l’ affection des motoneurones   supérieurs et celle qui frappe les motoneurones   inférieurs ?  Qu’est-ce qui est affecté le plus et à quel moment ?

Réponse : Voilà une question pertinente qui concerne la classification de la maladie de votre frère.  Pour comprendre les commentaires  du médecin il nous faut avoir d’abord quelques connaissances de base  au sujet de la terminologie concernant la structure du cerveau, de la moelle épinière et des muscles volontaires.  Cela risque d’être un peu compliqué; veuillez donc prêter la plus grande attention.

Ce qui suit, vous le savez sans doute, mais…   l’affaiblissement musculaire en cas de SLA est causé par la dégénérescence (atrophie),  le mauvais fonctionnement et le dépérissement des motoneurones, et non pas parce que le muscle lui-même serait défectueux.  Les neurones sont des cellules nerveuses;  les motoneurones   sont des cellules nerveuses qui interviennent dans la production du potentiel d’action.  C’est la raison pour laquelle la SLA est souvent définie comme « maladie des motoneurones », MND en anglais, « Motor Neuron Disease ».

Comment les motoneurones produisent-ils le mouvement ?  

Tout mouvement débute par une idée et une planification formées dans le cerveau : se rendre à la librairie, jouer avec le chat, aller chercher une bière, etc…   Le projet moteur aboutit finalement auprès des motoneurones   situés dans le cortex moteur du cerveau.  Ce sont ce qu’on appelle les « motoneurones supérieurs » (UMN « Upper Motor Neuron » en anglais) ou les « Motoneurones Corticaux ».  Supposons que vous voulez mouvoir votre main droite.

Les UMNs  dans la région de la main du cortex moteur  au côté gauche du cerveau  agissent sur les mouvements de la main droite.  Mais ce n’est que le début de l’histoire.  Ces neurones sont d’énormes cellules nerveuses dont le noyau se situe dans le cortex moteur.  Mais une partie du neurone,  appelée « axone »,  s’étend vers le bas, à partir du sommet du cerveau, en traversant le cerveau   en direction du côté droit et entre en contact avec un autre ensemble de motoneurones dans la moelle épinière cervicale, située dans la région du plan nucal.

Ce seul UMN mesure donc entre 30 et 60 cm.  On peut en conclure que les motoneurones spinaux sont les « motoneurones inférieurs » (LMN « Lower Motor Neuron).  Un LMN a aussi une forte taille.  Le noyau cellulaire du LMN  se situe dans la moelle épinière, mais son axone (fibre nerveuse,  prolongement  du noyau cellulaire)  quitte la moelle épinière, pénètre dans notre exemple le bras et prend contact avec les muscles du bras qui commandent le potentiel d’action de la main droite.  Il y a un grand nombre d’autres neurones qui interviennent dans la réalisation ou le dosage du mouvement, mais la construction de base UMN - LMN - muscle   est ce qui nous concerne pour l’étude de la SLA. Pour faire bouger la main l’ UMN envoie   un signal électrique au  MLN qui envoie  un second signal électrique aux muscles  qui, à leur tour, sont stimulés  à effectuer un mouvement de contraction. 

Comment savons-nous, neurologues, qu’il se pose un problème concernant les UMNs ou les LMNs ?  Généralement  un examen physique détermine des signaux et symptômes distincts selon qu’il s’agit de  la dégénérescence des motoneurones supérieurs ou inférieurs.  Les signes indiquant la maladie des UMNs  sont généralement la spasticité des muscles (raideur et résistance au mouvement), des réflexes brusques et un signe de Babinski (un réflexe qui est  un signe pathognomonique d’une atteinte des voies neurologiques  qui  relient le cortex moteur et la moelle épinière.)  Des signes qui trahissent une atteinte aux LMNs  sont  la faiblesse, l’atrophie musculaire (rétrécissement pathologique), et des fasciculations (contractions involontaires d’un faisceau musculaire).  Ces signes peuvent se produire dans n’importe quel faisceau musculaire tels que ceux des bras, des jambes, du torse, de la région bulbaire  (la moelle allongée ou bulbe rachidien situé entre le cerveau et la moelle épinière).

Lors d’une SLA classique on détecte aussi bien des signes UMN que des signes LMN dans une même région, p.ex.  le bras.   Cependant, il ya tout un spectre d’atteintes à l’intérieur d’une région déterminée.  Il arrive que des personnes présentent des symptômes qui s’associent surtout avec l’affection touchant les  UMNs, tels qu’une spasticité exceptionnelle et des mouvements au ralenti.  Cependant, un test EMG (Electromyographie)  donnera des indications pour la composante LMN de la SLA. Cela est probablement le cas qui concerne votre frère, c’est à  dire une SLA  qui affecte essentiellement les motoneurones supérieurs.

Il est rare qu’une personne puisse être atteinte uniquement par une affection des UMNs sans aucune disfonction des LMNs.  Aux Etats-Unis on désignerait cette situation par le nom de PLS (Primary Lateral Sclerosis) ou SLP (Sclérose latérale primitive).  Au côté opposé du spectre MND (maladie des motoneurones), certaines personnes peuvent présenter uniquement des signes LMN avec des constatations UMN minimales. 

Quel que soit le type de MND dont on souffre, il est à prévoir que la situation évoluera. De ce fait tous les patients seront confrontés à des problèmes de mobilité, des problèmes d’articu-lation au niveau de l’expression verbale  et de la communication,  des problèmes d’ingestion et d’insuffisance respiratoire.

Un suivi détaillé est impératif afin de gérer ces problèmes, ce que nous avons déjà commenté auparavant dans cette rubrique.

 

Traduction : Leo Vranckx

Source : The Exchange

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