La suppression d’une seule protéine allonge fortement la durée de vie de souris atteintes d’une forme de SLA

14-04-2017

Une série d’expériences à l’Université Stanford révèle que réprimer une protéine appelée ataxine 2 prolonge fortement la survie et améliore la fonction motrice dans un modèle murin de SLA.

Cette étude a révélé une nouvelle approche thérapeutique possible pour la sclérose latérale amyotrophique, une maladie neurodégénérative progressive.

L’équipe de Stanford a effectué une série d’expériences montrant que réprimer une certaine protéine dans un modèle murin de la SLA, pourrait nettement prolonger la durée de vie des animaux. Dans une expérience, aucune des souris non traitées n’a survécu plus de 29 jours, tandis que certaines souris traitées survivaient plus de 400 jours.

Aaron, Gitler

Aaron Gitler et ses collègues ont constaté que réprimer une protéine chez des souris ayant une forme de SLA leur a permis de vivre plus longtemps et a amélioré leur motricité.
Paul Sakuma

Un document décrivant le travail a été publié en ligne le 12 avril dans Nature. L’article — signé par Dr. Aaron Gitler, professeur associé de génétique, et Lindsay Becker, chercheuse diplômée — détaille une série d’expériences qui suggèrent une stratégie possible pour le traitement de la SLA.

A la découverte d’une approche différente 

La SLA est une maladie dans laquelle les cellules nerveuses du cerveau et de la moelle épinière dégénèrent, provoquant l’atrophie musculaire. Les patients perdent progressivement la capacité de bouger, de parler, de manger ou de respirer, ce qui mène souvent à la paralysie et à la mort dans les deux à cinq ans. Elle est associée à des facteurs de risque environnementaux, tels que la vieillesse et le service militaire. En outre, des mutations de certains gènes peuvent provoquer la SLA. Le fonctionnement exact de la SLA est encore peu connu, mais l’identification des gènes impliqués pourrait indiquer aux chercheurs quels processus à l’intérieur des cellules seraient de bonnes cibles pour les médicaments.

Un des indicateur de la SLA, mais aussi d’autres maladies neurodégénératives, est la présence d’agrégations de protéines dans le cerveau. Dans le cas de la SLA, ces agrégats sont constituées d’une protéine appelée TDP-43. L’élimination du TDP-43, et par conséquent des agrégats de TDP-43, pourrait sembler une bonne façon de prévenir ou de guérir l’ALS. Mais les cellules ayant besoin du TDP-43 pour survivre, sa suppression en elle-même n’est pas indiquée.

Certains des souris ont survécu des centaines de jours.

Une approche différente est nécessaire. Les chercheurs savaient qu’une seconde protéine, l’ataxine 2, a aidé à des cellules à survivre lors de la formation d’agrégats toxiques de TDP-43. Contrairement au TDP-43, l’ataxine 2 n’est pas essentielle pour la survie de la cellule, ce qui en fait une cible thérapeutique raisonnable, selon Gitler.

Dans une étude antérieure, l’équipe de Stanford a démontré que lorsque l’ ataxine 2 est supprimée ou bloquée dans des cultures de levures et de mouches des fruits, porteuses du gène humain TDP-43, les cellules sont plus résistantes aux effets toxiques potentiels du TDP-43 agglomérant.

Dans encore une autre étude, Gitler et ses collègues ont démontré que des versions du gène humain ataxine 2 qui ont donné lieu à une protéine plus stable d’ataxine 2 — et donc une augmentation de ces protéines — augmentent le risque de développer la SLA. Les chercheurs ont estimé que si les mutations qui ont augmenté la quantité d’ataxine 2 augmentaient les risques de SLA, réduire la quantité d’ataxine 2 protégerait peut-être une personne de la SLA.

 Becker a utilisé des souris génétiquement modifiées dont les neurones produisaient, à des niveaux élevés, la protéine TDP-43 humaine. Ces souris présentent certaines caractéristiques qui ressemblent à la SLA chez les humains, y compris une accumulation d’agrégats de TDP-43 dans leurs neurones. Ces souris ont des difficultés à marcher et ont généralement des durées de vie inférieures à 30 jours.

Gitler explique : « Nous voulions savoir si nous pourrions protéger ces souris contre les conséquences du TDP-43 en diminuant la quantité d’ataxine 2». Becker a modifié génétiquement des souris SLA pour avoir la moitié de la quantité normale d’ataxine 2 et a également conçu d’autres souris ou cette protéine manque totalement. Elle a constaté qu’avec la moitié d’ataxine 2, les souris de type SLA ont survécu beaucoup plus longtemps. Elle déclare : « Ce qui était vraiment incroyable, c’était que lorsque nous avons retiré complètement l’ataxine 2, il y avait vraiment une survie sans précédents : certaines souris ont survécu des centaines et des centaines de jours. »

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Une prévention efficace chez la souris

L’équipe de Gitler a ensuite essayé quelque chose qui pourrait avoir une valeur thérapeutique plus directe : le traitement des souris avec un médicament du type ARN, conçu pour bloquer la production d’ataxine 2. Ces « oligonucléotides antisens » sont des brins d’ADN manipulés qui ciblent un gène et bloquent l’expression de la protéine qu’il code. L’administration de ces oligonucléotides antisens dans les systèmes nerveux de certaines souris SLA a permis de maintenir leur état de santé beaucoup plus longtemps que chez les souris SLA traitées avec un placebo.

Un oligonucléotide antisens similaire a été approuvé récemment pour des essais d’innocuité chez des patients pédiatriques souffrants d’atrophie musculaire spinale, et d’autres oligonucléotides antisens ont passé les essais de sécurité. Selon Gitler, cela le fait espérer une stratégie similaire pour la SLA.

Becker a déclaré que l’étude a montré que la suppression de l’ataxine 2 a retardé l’apparition et a ralenti la progression de la maladie semblable à la SLA chez les souris qui n’en affichaient pas encore les symptômes. C’est une autre question de savoir si les oligonucléotides ou d’autres traitements bloquant les protéines pourraient inverser les symptômes chez les souris qui sont déjà malades. Elle explique : « C’est la prochaine série d’expériences à laquelle nous travaillons. Les agrégats TDP-43 survenant dans presque tous les cas de SLA, le ciblage de l’ataxine 2 pourrait constituer une stratégie thérapeutique très efficace ».

D’autres co-auteurs affiliés à Stanford sont la Dr. post-doctorante Brenda Huang; l’étudiant diplômé Gregor Bieri ; l’assistante de recherche Rosanna Ma ; et le chercheur postdoctoral Dr. David Knowles.

Des chercheurs de recherche du St. Jude Children’s Research Hospital, du Goethe University Frankfurt, de University of Utah, du Howard Hughes Medical Institute et de Ionis Pharmaceuticals ont également contribué à l’étude.

La recherché a été financée par: National Institutes of Health (grants R01NS065317, R01NS09386501, R01NS073660, R35NS097263 and NS069375), National Science Foundation, Robert Packard Center for ALS Research at Johns Hopkins, Target ALS, the Glenn Foundation, the German Research Foundation.

Le Stanford’s Department of Genetics a également financé cette recherche.

 

Traduction : Fabien

Source : Stanford Medicine

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