Interview avec un neurologue sur le potentiel avec NurOwn(R)

07-12-2016

CHARLOTTE, NC / ACCESSWIRE / BrainStorm Cell Therapeutics (NASDAQ : BCLI) est une société biopharmaceutique développant des thérapies de cellules souches adultes pour une gamme de maladies neurodégénératives, focalisée initialement sur la sclérose latérale amyotrophique (SLA). La société possède une technologie brevetée qui utilise un protocole de différenciation qui convertit les cellules souches mésenchymateuses (CSM) en cellules neuronales de support spécialisées (dites MSC-NTF, NurOwn®). Brainstorm réinjecte ensuite les cellules MSC-NTF au patient dans ou à proximité de la zone-cible pour le traitement.

En juillet 2016, Brainstorm a publié des informations importantes sur une étude en phase 2 (en double-aveugle et placebo), effectuée avec NurOwn® dans plusieurs Centres, pour le traitement de la SLA. La société est actuellement en train de finaliser l’analyse complète des données de cet essai et prévoit de présenter les résultats lors d’une conférence médicale durant la première moitié de 2017. Les résultats de l’étude en phase 2 semblent très positifs. Pourtant, la bourse n’a pas réagi en conséquence et il semble y avoir de nombreuses confusions du côté des investisseurs. En attendant, des études supplémentaires sont déjà prévues concernant le NurOwn® en doses multiples ainsi que l’enregistrement des essais.

La récente étude en phase 2 a eu lieu dans trois prestigieux centres médicaux aux Etats-Unis : la Mayo Clinic, la faculté de médecine de l’Université du Massachusetts et le Massachusetts General Hospital. Pour donner aux investisseurs une meilleure idée des informations et des perspectives d’avenir de Brainstorm, j’ai décidé de parler à l’un des chercheurs principaux de l’étude en phase 2, le Dr Merit E. Cudkowicz, un professeur de neurologie à la Harvard Medical School, chef du département de neurologie au Massachusetts General Hospital (MGH) et directeur de la clinique multidisciplinaire de la SLA.

BioNap (BN): Bonjour Dr. Cudkowicz. Merci beaucoup d’avoir pris le temps pour cette interview ! Avant d’entrer dans les détails, je voulais demander votre opinion sur où nous en sommes actuellement avec le traitement de la SLA et les défis auxquels les neurologues praticiens comme vous font face lors du traitement des patients SLA ?

Dr. Merit E. Cudowicz (MC): La SLA est notoirement difficile à traiter. Aujourd'hui, nous n’avons pas beaucoup de bonnes options à notre disposition. Un des défis majeurs est l’hétérogénéité des patients. Les patients évoluent tous à des vitesses différentes, certains déclinent rapidement en seulement quelques années tandis que d’autres se détériorent lentement au cours de plus d’une décennie. Quoi qu’il en soit, la maladie est presque toujours fatale.

BN: Parlons de l’utilité d’une thérapie cellulaire pour la SLA. Il semble y avoir une certaine confusion et des inquiétudes sur les thérapies cellulaires aux États-Unis, même concernant les thérapies par autogreffe de cellules de la moelle osseuse. Les gens semblent ne pas comprendre ce que cela signifie, en quoi consiste ce processus de fabrication d’un produit comme NurOwn®, ou s’il est susceptible d’être approuvé par la FDA (US Food and Drug Administration). Vous avez administré des doses de NurOwn à des patients. Quelles sont vos constatations sur la récolte des cellules et la transplantation chez les patients ?

MC: Nous n’avons pas eu de constatation qui en limiterait l’absorption, et nous avons administré des doses à une douzaine de patients au MGH. Médecins et patients recherchent un traitement pour la SLA. Nous voulons essayer tout ce qui peut aider à soigner cette terrible maladie. Nous les médecins, nous voulons quelque chose qui a un mécanisme gagnant. Que ce soit une thérapie cellulaire ou une autre approche, si elle est scientifiquement valide, nous allons lui donner une chance.

BN: Y a-t-il eu des réticences de la part des patients au cours du processus ? NurOwn® implique un nombre important d’injections - 24 intramusculaires et une intrathécale - pour le patient.

MC: La plupart de ces patients sont habitués aux injections, ce n’est pas un problème, et les aiguilles sont très petites. De plus, nous analysons les données et essayons de réduire le nombre d’injections. Par exemple, nous pensons que l’efficacité vient de l’injection intrathécale (IT), ce qui permettrait d’éliminer éventuellement les multiples injections intramusculaires (IM) dans les bras. Lors d’études passées, nous avons administré NurOwn® par des injections IM unilatérales ou bilatérales dans les bras, et une injection IT. Si nous arrivons à éliminer les multiples injections IM, l’administration deviendrait beaucoup plus efficace pour le médecin et supportable pour le patient. En outre, l’administration de médicaments par injection IT est une pratique courante pour les neurologues et les anesthésistes, donc nous n’y voyons pas de problèmes significatifs.

BN: Avant d’entrer dans les données d’efficacité de l’essai en phase 2, nous allons parler de la sécurité, parce que c’était vraiment le critère principal d’évaluation. Il s’agit évidemment d’une population difficile à traiter. Je suis impressionné que 92 % des sujets ayant reçu des doses de NurOwn® ont terminé l’étude. Quelles ont été vos constatations concernant l’innocuité et la tolérance de la thérapie avec NurOwn®?

MC: Jusqu'à présent, tout se passe très bien. Nous ne voyons pas d’ effets secondaires ou indésirables devant limiter l’absorption du produit ou notre capacité à continuer avec des études subséquentes. Comme j’ai indiqué plus haut, nous cherchons à éliminer potentiellement les injections IM afin d’accroître l’efficacité du traitement et la tolérance des patients.

BN: Avez-vous des soucis pour passer aux tests NurOwn® en phase 3, plus précisément en gardant à l’esprit que la société y prévoit un protocole à doses multiples ?

MC: Non, au contraire, nous sommes très enthousiasmés par la possibilité de progresser avec un protocole à doses multiples.

BN: Nous allons parler du taux de réactions lors de l’essai en phase 2, ou plus précisément, l’analyse de ces réponses. Il y avait évidemment une grande réponse immédiatement après la transplantation. Les données montrent un taux de réponse de 74 % pour la semaine 2 et un taux de réponse de 54 % après la semaine 4. Dans les deux cas, l’amélioration a été assimilée à une amélioration de 100 % (score de ALSFRS-R) par rapport à avant le traitement. Première question: ces types d’améliorations importantes sont-ils fréquents chez les patients SLA ?

MC: Non, pas du tout. Je traite des patients SLA depuis plus de 25 ans, et nous voyons très rarement des cas d’amélioration de 100 %. Les patients évoluent de façon irrégulière, la maladie a des périodes de stabilisation et de déclin rapide, mais l’amélioration est très rare chez la SLA. La trajectoire est presque toujours descendante. Nous ne voyons pas ce type de réponse avec le riluzole.

BN: J’ai lu votre article de 2010 dans ALS (Castrillo-Viguera et al., 2010). Il semble évident que ce type d’amélioration dans le score ALSFRS-R est cliniquement significative, mais est-il significatif du point de vue de la durée dans le temps ? Quel type d’amélioration - ou même de stabilisation - est cliniquement significatif ?

MC: Toute période d’amélioration est importante pour le patient, car la progression peut souvent être rapide et fatale. Plus nous parvenons à empêcher la détérioration d’un patient, plus nous augmentons la chance d’améliorer son espérance de vie. L’objectif est de garder le patient ambulatoire et d’éviter l’appareil respiratoire. Et si nous parvenons à retarder cela, c’est sûrement important pour le patient.

BN: À cet égard, à la fin des 24 semaines de l’étude, la différence entre les sujets NurOwn® et le groupe placebo n’était plus significative statistiquement. Sommes-nous simplement confrontés au fait que les cellules NurOwn® ne sont actives que pendant quelques semaines ?

 MC: Nous savons que les cellules sont actives et produisent des facteurs neurotrophiques seulement pendant une certaine période. Nous sommes encore en train d’analyser la durée exacte. Je suis enthousiasmé par les données de biomarqueurs et la preuve que les cellules MSC-NFT font réellement ce que nous disons qu’ils font. Cela dit, d’autres études sont nécessaires pour parfaire la posologie.

BN: Pensez-vous que les transplantations ultérieures de NurOwn® provoqueront une réponse plus durable, et si oui, combien de greffes supplémentaires seront nécessaires et quand pensez-vous qu’il faudra administrer la deuxième ou troisième etc. dose du produit ?

MC: Dans l’étude en phase 3 à venir, nous prévoyons de traiter les patients tous les deux mois pour un total de trois traitements. Nous espérons obtenir une réponse durable en continuant à administrer des cellules qui produisent des facteurs neurotrophiques. Nous avons l’intention d’effectuer des analyses supplémentaires par biomarqueurs lors de cet essai pour mieux quantifier cet effet, mais NurOwn® est bien une thérapie, tout comme une pilule. Si vous prenez une pilule, l’effet peut ne durer qu’une seule journée. Presque toutes les thérapies demandent des doses ultérieures et il est logique de croire que nous allons voir une réponse améliorée avec un traitement continué.

BN: Je suis intrigué par le fait que les patients avec le score de ALSFRS-R déclinant le plus rapidement pendant la période préparatoire semblaient répondre mieux aux NurOwn® que les patients définis comme « progresseurs lents. » La société a défini les patients avec un score en déclin de ≥ -2 comme « progresseurs rapides », et étonnamment, ces patients présentaient un taux de réponse globale bien supérieur aux « progresseurs lents ». Les données sont restées statistiquement significatives par rapport au groupe placebo même après les semaines 2 et 4. Est-ce simplement un résultat de la façon dont la maladie réagit et ou pensez-vous qu’il y a d’autres mécanismes en cause chez ces patients ?

MC: Je pense que c’est une combinaison de l’évolution de la maladie et aussi du fait que ce sont ces patients qui peuvent le plus bénéficier lors d’un processus si court. Il est plus facile de détecter un avantage chez une population avec une progression rapide par rapport à chez des patients qui ne changent pas. Donc il peut ne pas y avoir quelque chose de mécanique chez ces patients, mais juste le fait que pour montrer une différence, un patient a besoin de changer d’état.

BN: Je trouve l’analyse de biomarqueurs faite par la société très intéressante. C’est une procédure qui semble actuellement très fiable, mais qu'un neurologue comme vous doit encore évaluer patient par patient. Les patients traités ont présenté une augmentation des niveaux de facteurs neurotrophiques dans le liquide céphalorachidien ( LCR), tels que le facteur de croissance endothélial vasculaire (FCEV) et le facteur de croissance des hépatocytes (HGF), et une baisse des taux de marqueurs inflammatoires tels que le MCP-1 et SDF-1. Est-ce quelque chose à suivre pour voir si les patients répondent à la thérapie cellulaire ?

MC: Absolument ! Nous cherchons des moyens pour soigner le mieux possible les patients SLA : au mieux nous comprendrons comment un traitement comme NurOwn® fonctionne, au mieux nous saurons initier le traitement. Si la thérapie fonctionne, nous pouvons continuer à l’administrer aux patients. Sinon, nous pouvons essayer d’autres alternatives de traitements, mais bon, maintenant nous n’avons pas beaucoup d’autres options. Aussi la possibilité de tester quelque chose comme NurOwn® et ensuite de suivre presque en temps réel le patient et les effets biologiques est très enthousiasmante.

 BN: Si l’étude en phase 3 est positive et les données sur la sécurité continuent à rassurer, est-ce que NurOwn® deviendra une « évidence » à votre avis ?

MC: Eh bien, comme je l’ai dit, nous n’avons aujourd'hui pas beaucoup d’autres options disponibles, donc je suis impatient de continuer avec la prochaine série d’études. Nous n’avons, à ce stade, aucune hésitation et, jusqu'à présent, les résultats sont très encourageants.

BN: Merci Dr. Cudkowicz!

MC: Avec plaisir!

 

Traduction : Fabien

Source : BayStreet.ca

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