Des chercheurs créent des « mini-cerveaux » dans le labo pour étudier les maladies neurologiques

18-03-2016

Utilisation de structures a source humaine pourrait permettre de meilleures recherches et reduire le testing sur animaux

Des chercheurs de l'Ecole de Santé Publique Johns Hopkins Bloomberg (Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health) affirment qu'ils ont développé de minuscules « mini-cerveaux » à partir d'une multitude de neurones et cellules du cerveau humain -ils ont même réussi à atteindre une partie de sa fonctionnalité. Ces cerveaux pourraient être reproduits à large échelle.

Les chercheurs disent que la création de ces « mini-cerveaux, » qui seront discutés à la conférence de l'Association Américaine pour l'Avancement de la Science (American Association for the Advancement of Science) à Washington, DC le 12 février à l'occasion d'un briefing de presse et pendant une session le 13 février, changera probablement -et dramatiquement- la façon dont les nouveaux médicaments seront testés sur efficacité et sécurité, en prenant la place des centaines de milliers d'animaux auxquels on a recours dans les recherches scientifiques neurologiques aux Etats Unis. Ces recherches à base de « mini-cerveaux » à trois dimensions -des boules de cellules du cerveau qui, en croissant, formeront toutes seules des structures semblables à celles du cerveau, dans une période de huit semaines- devraient être supérieures aux études des souris et des rats parce qu'ils sont dérivés de cellules humaines et non pas de cellules de rongeurs.

« Quatre-vingt-quinze pour cent des médicaments qui ont l'air d'être prometteurs lorsqu'ils sont testés dans un modèle avec animaux échouent une fois testés sur un être humain, ce qui représente une perte considérable tant d'argent que de temps, » dit le chef de l'étude Thomas Hartung, MD, PhD, Professeur Résident (?) de Toxicologie Basée sur Epreuves de l'école de Bloomberg et appartenant à la Fondation Doerenkamp-Zbinden. « Même si les modèles des rongeurs ont prouvé leur utilité, nous devons souligner que nous ne sommes pas des rats de 75 kilos. Et même si nous ne sommes pas non plus des boules de cellules, il sera souvent possible d'en obtenir de meilleures informations que si l'on part de cellules de rongeurs. »

« Nous pensons que l'avenir des recherches au domaine du cerveau sera tel qu'on comptera moins sur les animaux et davantage sur les modèles partant des cellules humaines. »

Hartung et ses collègues ont créé les cerveaux en partant de ce qu'on appelle des cellules souches pluripotentes induites (iPSCs). Il s'agit de cellules adultes reprogrammées d'abord génétiquement vers un état embryonique ressemblant à des cellules souches et stimulées ensuite à devenir, en croissant, des cellules du cerveau. Des cellules provenant de la peau de plusieurs adultes en bonne santé ont été utilisées pour la création des mini-cerveaux, mais Hartung dit que les cellules de personnes ayant certains traits génétiques ou qui sont atteintes de certaines maladies peuvent être utilisées pour créer des cerveaux servant à étudier différents types de médicaments. Il affirme en outre que les cerveaux peuvent être utilisés dans l'étude de la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson, la sclérose en plaques et même l'autisme. On vient d'entamer des projets d'étude pour les infections virales, les traumatismes et les crises cardiaques.

Les mini-cerveaux de Hartung sont très petits -avec leur diamètre de 350 micromètres, soit la dimension de l'oeil d'une mouche, ils sont à peine visibles pour l'oeil humain- et il est possible de produire des centaines de milliers de copies exactes dans chaque lot. Au labo on constatera facilement la présence d'une centaine de ces cellules dans une seule boîte de Petri. Après que les mini-cerveaux avaient été cultivés pendant une période d'environ deux mois ils développaient quatre types de neurones et deux types de cellules de support: des astrocytes et des oligodendrocytes. Ce sont ces derniers qui allaient ensuite créer de la myéline, qui isole les axones des neurones et les permet de communiquer plus rapidement.

Les chercheurs ont pu regarder/suivre le développement de la myéline et voir de leurs propres yeux comment elle commençait à couvrir les axones. Les cerveaux montraient même une activité électrophysiologique spontanée, enregistrée à l'aide d'électrodes, comme c'est aussi le cas pour les électro-encéphalogrammes (EEG). En guise de test les chercheurs liaient le mini-cerveau à une série d'électrodes et écoutaient la communication électrique spontanée des neurones au fur et à mesure que des médicaments (de test) étaient ajoutés.

« Nous n'avons pas le premier modèle de cerveau et nous ne prétendons pas non plus que ce soit le meilleur, » dit Hartung, qui se trouve également à la tête du Centre de l'Ecole pour les Alternatives pour le Testing sur Animaux (School’s Center for Alternatives to Animal Testing).

« Mais le modèle présent est le plus standardisé. Et pour le testing de médicaments il est obligatoire que les cellules étudiées ressemblent le mieux possible aux cellules humaines afin d'assurer des résultats qui soient des plus comparables et des plus précis. »

Actuellement Hartung cherche à obtenir un brevet pour les mini-cerveaux. En outre ils est en train de développer une entité commerciale nommée ORGANOME en vue de leur production. Il espère que toujours en 2016 la production pourra commencer. Il dit qu'ils sont facilement reproductibles et espère qu'un jour les scientifiques les utiliseront dans le plus grand nombre de labos possible. « Ce sera seulement lorsque nous pourrons avoir les modèles de cerveau comme celui-ci dans n'importe quel labo et à n'importe quel moment que nous serons capables de remplacer le testing sur animaux à une échelle significative, » dit-il.

Le travail a été supporté par le Centre National des Instituts Nationaux de la Santé pour l'Avancement des Sciences Translationnelles (National Institutes of Health’s National Center for Advancing Translational Sciences) (U18TR000547), la Fondation pour la Recherche et le Développement d'Alternatives (Alternatives Research & Development Foundation) et le Fonds Bart McLean pour la Recherche Neuro-immunologique/le Rétablissement des Projets (le Rétablissement des Projets de Recherche Neuro-immunologique?) (Bart McLean Fund for Neuroimmunology Research/Project Restore).

D'autres chercheurs faisant partie du projet incluent David Pamies; Paula Barreras, Katharina Block; Georgia Makri; Anupama Kumar; Daphne Wiersma; Lena Smirnova; Che Zang; Joseph Bressler; Kimberly M. Christian; Georgina Harris; Guo-li Ming; Cindy J. Berlincke; Kelly Kyro; Hongjun Song; Carlos Pardo; Thomas Hartung et Helena T. Hogberg.

 

Traduction : André De Laet

Source : Johns Hopkins Bloomberg École de santé publique

Share